Collectif "Sauvons le Climat"
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Président : Hervé Nifenecker
version longue de la tribune libre parue dans "la tribune" du 5 novembre
Réchauffement climatique : ne pas se tromper de méthode
Par
Michel Petit, Président de la Commission
Environnement de l’Académie des Sciences
Hervé Nifenecker, Président de « Sauvons
le Climat », co-président du colloque « Energies et effet de serre »
Gilbert Ruelle, Président de la Commission
Energie de l’Académie des Technologies
Didier Wirth, Président du Comité des
Parcs et Jardins de France, co-président du colloque « Energies et effet de
serre »
L'initiative prise par le Président de la
République de convoquer un « Grenelle de l'Environnement » se traduit par
une vaste prise de conscience des problèmes environnementaux dans notre
pays, et tout particulièrement des conséquences du réchauffement climatique.
Un certain nombre de pistes proposées par le Président de la République le
25 octobre vont, incontestablement, dans le bon sens : accélération du
programme de rénovation et d’isolation des logements anciens, eco-pastille
sur les nouvelles voitures, prime à la casse sur les anciennes, transfert du
fret de la route vers le rail, encouragement au développement des transports
en commun…
Il reste qu’il manque à l’ensemble des
propositions sur l’énergie une stratégie claire de priorité donnée aux
économies de combustibles fossiles et de réduction des émissions de gaz à
effet de serre. Même si cette priorité est affirmée par le Président de la
République, son application reste ambiguë dans les mesures proposées.
En effet, le rapport final laisse entendre que
les économies d’énergie sont « Le Moyen » de relever le défi climatique
alors qu’il n’existe aucune raison scientifique d’en faire un objectif en
soi. On peut citer de nombreux exemples dans lesquels une dépense
supplémentaire d’énergie permet de réduire les émissions de gaz à effet de
serre. La composition du collège des associations, peu représentatif des
divers courants d’idées de la société française, laissait prévoir de grosses
difficultés. Le désaccord, clairement reconnu, sur la question cruciale du
nucléaire, ne pouvait amener qu’à minimiser le rôle de l’électricité
produite sans recours aux combustibles fossiles. Ainsi observe-t-on un
curieux silence sur le chauffage électrique direct ou par pompe à chaleur,
ou des motorisations hybrides rechargeables ou électriques.
C’est dans ce contexte et dans l’espoir
d’enrichir le débat en faisant entendre la voix des exclus du Grenelle de
l’Environnement que s’est tenu, le 10 octobre au Palais du Luxembourg, le
colloque « Energies et effet de serre » organisé par une douzaine
d’associations de défense de l’environnement et du patrimoine paysager
comptant plusieurs dizaines de milliers d’adhérents, avec le soutien et la
participation des Académies des Beaux Arts, des Sciences et des
Technologies, elles aussi officiellement absentes du Grenelle officiel.
Fixer les priorités en termes de rejet
de CO2
Alors que tous les signaux climatiques sont
désormais au rouge, il n’est plus l’heure de tergiverser ni de s’égarer dans
des chemins de traverse. Toute politique énergétique et climatique doit
retenir comme critère fondamental la réduction des émissions de gaz à effet
de serre qu’elle est susceptible d’entraîner.
La multiplicité des objectifs énergétiques
fixés par les directives européennes : 20% de réduction des émissions de
CO2, 20% d’économies d’énergie, 20% d’énergies renouvelables et 21%
d’électricité renouvelable est déraisonnable. Il y a lieu de se concentrer
sur un seul objectif : la réduction des émissions de CO2, les économies
d’énergie et le recours aux énergies renouvelables n’étant encouragées ou
imposées que dans la mesure où ils concourent à l’objectif principal.
Dans cette optique le critère d’efficacité CO2
doit être quantifié. Les actions les plus efficaces en termes de coût de
réduction d’émissions de gaz à effet de serre doivent être privilégiées.
Elles peuvent se décliner sous forme de réglementations, de normes, de
subventions et de taxes. Ces dernières - qui doivent être assises sur les
émissions de CO2 et non sur la simple consommation d’énergie - devront, par
des aides spécifiques, veiller à ne pas rendre encore plus difficiles les
conditions de vie des moins favorisés.
Développer les usages de l’électricité
et bien choisir les sources
C’est dans le domaine du chauffage des
logements et bureaux que les actions sont les plus payantes, et, donc les
plus urgentes : isoler certes, mais, aussi, décourager l’usage du chauffage
au fioul, au gaz et au charbon en allant jusqu’à l’interdiction de l’usage
de ce type de ce chauffage pour les constructions neuves ou les rénovations
lourdes.
En France, 10% de la production d’électricité
reste d’origine fossile. Il est nécessaire de réduire cette part et, a
fortiori, de ne pas la laisser croître, contrairement à la tendance
actuelle. Les promoteurs des nouvelles centrales à charbon en projet
laissent à penser que la technique de captage-stockage du CO2 est
pratiquement au point. Il y a donc lieu d’exiger que toute nouvelle centrale
à charbon (ou gaz) soit dotée d’un tel dispositif opérationnel avant qu’elle
soit autorisée à vendre du courant.
Un très grand programme éolien a été lancé en
2006 par la Programmation Pluriannuelle des Investissements de production
électrique, qui a prévu la construction de 17000 MW éoliens dont 4000
offshore. L’investissement correspondant est estimé à 18 milliards d’euros
(soit 6 EPR). Le caractère aléatoire du vent limite la puissance moyenne
délivrées par ces installations au cinquième environ de leur puissance
nominale. L’énergie délivrée ne produira donc pas plus que 2,5 EPR. Il est
aussi probable qu’il soit nécessaire, pour faire face aux périodes de vent
faible ou nul, d'utiliser des turbines à gaz en cycle ouvert de faible
rendement. La mise en œuvre d’un tel parc éolien, bénéficiant d’une
obligation d’achat à un prix constituant une rente anormalement élevée pour
les investisseurs, représentant un surcoût annuel pour les consommateurs
d'environ 3 milliards d’euros, conduirait alors, paradoxalement, à une
augmentation des rejets de CO2. Un moratoire sur l’obligation d’achat dont
les effets pervers sont évidents devrait être envisagé en attendant un débat
sur l’éolien aussi sérieux que celui qui s’est tenu sur l’EPR.
Grâce à une électricité produite avec de
faibles émissions de CO2 la France est remarquablement placée pour réduire
considérablement les émissions du secteur des transports. Il s’agit, tout
d’abord, d’encourager l’usage des transports en commun électriques. On ne
sait pas assez que, dans des pays utilisant largement une électricité
d’origine fossile, les trains diesel ont un meilleur bilan CO2 que les
trains électriques. C’est, évidemment, l’inverse qui est vrai lorsque
l’électricité est produite par les énergies renouvelables et nucléaire. De
ce fait, notre pays est un des rares où l’utilisation des véhicules hybrides
rechargeables, dans lesquels une fraction importante de l’énergie est
fournie par l’électricité, ou de véhicules purement électriques, conduirait
à une forte réduction des émissions de CO2. Il est donc urgent que
l’industrie automobile française s’engage avec dynamisme dans la production
de ces véhicules, avec un encouragement clair et durable des pouvoirs
publics.
L’extension des usages de l’électricité dans
de nouveaux domaines conduira à une augmentation de sa consommation. Il y a
donc lieu, pour que notre pays profite pleinement de sa structure de
production électrique, de mettre rapidement en chantier une série de
nouveaux réacteurs nucléaires.
Une opportunité pour la France ?
En Europe, deux variantes de politiques
énergétiques sont développées : l’une, suivie depuis longtemps par le
Danemark et à laquelle l’Allemagne et l’Espagne se sont ralliées, repose sur
le refus du nucléaire, le développement de l’électricité renouvelable - plus
particulièrement de l’éolien - et le maintien d’un important recours à
l’électricité fossile ; l’autre, suivie par la France, la Suisse et la
Suède, repose sur un recours très faible à cette dernière. Les rejets de CO2
dans les premiers pays sont de l’ordre 10 tonnes par habitant alors qu’ils
sont de l’ordre de 6 pour les autres…
Pourquoi vouloir imposer le premier modèle au
détriment du second, comme le font l’Alliance et la FNE ? Ne serait-il pas
plus intelligent d’organiser une compétition vertueuse entre eux en fixant
un délai à l’issue duquel on pourrait
évaluer leur efficacité relative. Au bout de ce délai l’Europe pourrait
choisir le modèle ayant donné les résultats les meilleurs en ce qui concerne
les émissions de CO2, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit. Nous sommes
convaincus que notre pays a des atouts exceptionnels à faire valoir.
Laissons l’expérimentation trancher.
Le collectif "Sauvons le climat " fondé en mai 2004, association loi 1901
depuis Décembre 2005, a pour ambition d’informer nos concitoyens, de manière
indépendante de tout groupe de pression ou parti politique, sur les problèmes
relatifs au réchauffement climatique et sur les solutions proposées pour le
ralentir. Il est doté d’un comité scientifique, présidé par Michel Petit, ancien
responsable du groupe français d’experts au GIEC. Son manifeste a été signé par
plusieurs milliers de personnes.
La signature du manifeste et les adhésions sont possibles sur le site "http://www.sauvonsleclimat.org
".
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