Les artisans embauchent de plus en plus mais délaissent le
CNE
LE MONDE | 30.07.07 | 15h06 • Mis à jour le 30.07.07 | 15h06
Les artisans recrutent et déclarent vouloir embaucher dans les prochains mois.
Selon une enquête réalisée par I + C pour l'Union professionnelle des artisans (UPA),
effectuée sur le premier semestre 2007 auprès d'un panel de 3 150 entreprises
artisanales (bâtiment, services, alimentation et fabrication), une entreprise
sur quatre ayant au moins un salarié, déclare avoir embauché au cours du premier
semestre 2007, soit 15 % de l'ensemble des artisans.
Ainsi que l'explique l'UPA, "à la faveur d'une conjoncture plus porteuse, les
embauches marquent une vive progression". Le bâtiment reste toujours le secteur
le plus dynamique avec 30 % d'embauche pour les entreprises d'au moins un
salarié, 17 % pour le total des artisans du secteur. Dans l'alimentation, les
taux sont de 26 % (19 %), en augmentation de 6 points par rapport à 2006 et de
12 points par rapport à 2005. Dans les services en revanche, le recul est de 5
points par rapport à l'année dernière.
L'enquête révèle aussi l'optimisme des artisans quant à leurs intentions
d'embauche au deuxième semestre 2007. Une entreprise sur cinq, y compris les
entreprises individuelles, "envisagent de procéder à des recrutements, 1,3
salarié en moyenne", un score supérieur de deux points à celui de 2006,
"pourtant d'excellente facture" selon l'UPA. Sur les perspectives d'embauche,
l'alimentation (23 %) et le bâtiment (22 %) restent les secteurs les plus
dynamiques.
Mais, les difficultés pour recruter augmentent. 46 % des artisans interrogés
déclarent en rencontrer, soit huit points de plus qu'en 2006. Dans le bâtiment,
la proportion atteint 59 % (+ 13 points), 50 % dans la fabrication et 39 % dans
l'alimentation.
Dans ce contexte, les artisans guettent avec intérêt les mesures du
gouvernement, Parmi lesquelles la détaxation des heures supplémentaires votée
dans le cadre de la loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat.
Jean-Jacques Chatelain, artisan peintre à Buc (Yvelines) se dit "à l'affût". "Si
les heures supplémentaires sont exonérées et que les gars ne payent pas d'impôt,
il y aura une vraie incitation", pense-t-il. Selon lui, le risque que les heures
supplémentaires jouent contre l'embauche n'existe pas. "Les heures sup'ne sont
là que pour les coups de bourre, pas pour démarrer de nouveaux chantiers",
explique M. Chatelain.
Même attrait pour Pierre Perrin, boucher à Lyon. Cet artisan de 59 ans, qui
salarie sept personnes voit "arriver avec bonheur" le nouveau mode de calcul.
"Mes salariés font une vingtaine d'heures sup'par mois actuellement, raconte M.
Perrin, mais pour les fêtes, on peut faire jusqu'à 5 à 6 heures en plus."
L'étude réalisée par l'UPA révèle aussi que le contrat nouvelles embauches
(CNE), destiné aux petites entreprises, connaît de moins en moins de succès. Les
CDI représentent 48 % des embauches effectuées au premier semestre 2007 (56 %
dans les entreprises de plus de dix salariés) et les CNE 10 %, soit un recul de
4 points par rapport à 2006. Avec 46 %, les CDI représentent encore la plus
grande part des intentions d'embauche pour le deuxième semestre 2007. Le CNE ne
séduit plus que dans 5 % des cas.
Artisan coiffeur à Courbevoie (Hauts-de-Seine), Philippe Thouron aurait bien
"sauté le pas", mais le CNE lui "paraît mal barré juridiquement". "Quand on
licencie un salarié, on n'a pas le choix, fait-il valoir, et un licenciement,
avec le Code du travail, c'est un peu la boîte à gifles pour l'employeur". Comme
ses collègues du bâtiment et de l'alimentation, M. Thouron réclame "de
l'assouplissement". En attendant, il espère embaucher en septembre et ce ne sera
pas un CNE : "D'abord un CDD et, si tout va bien, ensuite un CDI."
Rémi Barroux
Article paru dans l'édition du 31.07.07