Par LAUREEN ORTIZ
QUOTIDIEN : jeudi 2 août 2007
Cette fois, le coup est venu de Poitou-Charentes. Depuis trois semaines, le
contrat nouvelles embauches (CNE) accumule à nouveau les démêlés avec la
justice, lui qui avait pourtant suscité peu de bruit lors de sa création en août
2005, comparé au tollé provoqué par son «cousin» le CPE.
Après deux décisions défavorables de la cour d’appel de Paris et de celle de
Bordeaux en juillet, c’est cette fois Ségolène Royal qui a marqué un point,
lundi, contre ce contrat à durée indéterminée qui prévoit, pour les entreprises
de 20 salairés ou moins, une période d’essai de deux ans durant laquelle
l’employeur peut licencier un salarié sans motif.
«Précarité». La présidente de la région Poitou-Charentes avait décidé, en
février 2006, d’exclure des primes régionales pour l’emploi les entreprises
ayant recours au CNE, «au motif qu’il favorise la précarité», précisait hier la
Région. En juin 2006, un complément à cette décision rendait inéligible à
l’attribution d’aides économiques toute entreprise du bâtiment qui souhaitait
embaucher un jeune en CNE.
La préfecture de la Vienne est alors montée au créneau en jugeant cette
politique illégale : le CNE avait été validé par le Conseil d’Etat et pouvait
donc, selon elle, s’appliquer sur l’ensemble du territoire. L’ancien préfet
Bernard Niquet avait saisi le tribunal administratif en août 2006, demandant
l’annulation de ces deux mesures.
Mais, sur tous les éléments reprochés à Ségolène Royal, le tribunal
administratif de Poitiers lui a donné raison. «Contrairement à ce que soutient
le préfet, rien dans ces dispositions ne fait légalement obstacle à ce que la
région décide de ne pas attribuer d’aides au recrutement de salariés réalisé au
moyen du CNE.» Le tribunal a conclu que la région était compétente en matière de
politique de l’emploi, et que celle-ci ne créait pas de discriminations entre
les entreprises. «Il n’y a en effet pas de droit à la prime automatique»,
explique le directeur général des services au conseil régional, Jean-Luc
Fulachier, insistant sur la volonté de la présidente de soutenir les embauches
en CDI. Selon un communiqué de la région, Ségolène Royal «a noté avec
satifaction que la défense de la qualité de l’emploi est validée par les juges».
«Cause». Début juillet, la cour d’appel de Paris avait déjà porté un coup
sérieux au CNE en le jugeant contraire au droit international, via la convention
158 de l’Organisation internationale du travail. Quelques jours plus tard,
c’était au tour de la cour d’appel de Bordeaux de frapper. S’appuyant sur la
même convention internationale, les juges bordelais ont qualifié le licenciement
d’un salarié employé en CNE comme «dépourvu de cause réelle et sérieuse». Dans
le cas poitevin, le nouveau préfet, Bernard Fragneau, qui n’a pas souhaité
commenté la décision, a deux mois pour faire appel.
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