Allocution
de Georges SARRE
Président
du Mouvement des Citoyens
Mesdames,
Messieurs,
Chers
Amis, Chers Camarades,
Mes
Chers Compatriotes,
Nous sommes réunis ici,
ce soir, à Guéret, parce que nous nous interrogeons sur l’avenir de notre
pays, la France. Nous nous demandons quelles sont les perspectives qui lui sont
offertes, qui sont offertes à notre jeunesse. Nous sentons que les échéances
électorales du printemps 2002 seront décisives. Comme vous ne l’ignorez pas,
avec le Mouvement des Citoyens, j’ai choisi de soutenir la candidature de
Jean-Pierre Chevènement.
Mais pourquoi donc
Jean-Pierre Chevènement s’est-il déclaré candidat à la Présidence de la République
le 4 septembre dernier ? Pour relever la France avec la République. Le
moment est crucial, la société française va mal, l’autorité de l’Etat
est battue en brèche. Le Gouvernement capitule devant les poseurs de bombes maîtres-chanteurs,
les gardes républicains refusent d’obéir aux ordres de leur chef, dans la
cour de l’Elysée, l’insécurité grandit, le chômage remonte, la Banque
Centrale Européenne refuse de baisser les taux, la France est menacée dans son
être.
Quelles sont les menaces qui pèsent tant
sur la France que sur la République ? Le délitement de l’intérêt général
en vue d’une soumission au marché où triomphe la jungle des intérêts
particuliers, l’oubli de la citoyenneté pour mieux enfermer les individus
dans des communautés plus ou moins improbables, la construction fédéraliste
de l’Europe qui vise à détruire les nations au profit des régions. Voilà
les raisons de la candidature de Jean-Pierre Chevènement. Il faut savoir dire
non et il faut savoir proposer et décider.
Que peut-on faire pour aider Jean-Pierre
Chevènement dans sa démarche de retour à la République ? Constituer un
pôle républicain où se retrouveront toutes les citoyennes et tous les
citoyens qui ne désespèrent pas de la France. Nous ne leur demandons pas d’où
ils viennent. Nous leur demandons où ils veulent aller. Alors, s’ils veulent
aller à la République, nous leur proposons d’y aller ensemble.
Ce pôle républicain doit
rassembler, à Guéret comme ailleurs, au-delà des clivages traditionnels. Il
doit accueillir gaullistes, communistes, socialistes, radicaux ou encore tout
simplement tous les patriotes, hommes et femmes de bonne volonté pour la
France. Il doit s’adresser à toutes les couches sociales, à tous les
courants philosophiques, à toutes les sensibilités, à tous les âges,
particulièrement à cette jeunesse qui cherche désespérément des repères.
Il doit s’adresser à tous les Français. Il doit fédérer toutes les énergies,
non seulement en vue de l’élection présidentielle, mais aussi dans la
perspective des élections législatives qui suivront immédiatement. Nous
devons y présenter des candidats, dont au moins la moitié ne sera pas issue
des rangs du Mouvement des Citoyens. C’est l’occasion
de changer le personnel politique, de le renouveler profondément, une
autre génération doit arriver au pouvoir.
Le programme de ce pôle républicain
peut se synthétiser dans les trois principes énoncés dans la devise même de
la République : Liberté, Egalité, Fraternité. La liberté est aux
antipodes de l’individualisme débridé. Au contraire, elle se traduit par la
soumission de chacun à la loi librement élaborée en commun. La loi définit
le champ de l’intérêt général en délimitant la sphère de la vie privée.
Cette séparation est l’essence même de cette laïcité aujourd’hui si
menacée par tous les communautarismes. L’Egalité en droit fonde la
citoyenneté. Elle ne se confond pas avec un égalitarisme aussi paralysant
qu’inquisiteur. Les distinctions légitimes reposent sur le talent et
l’utilité commune. La Fraternité est l’autre nom de la République
sociale. Sa finalité est de permettre à chaque citoyen de subvenir à ses
propres besoins et à ceux de sa famille, si possible par son travail, ou à défaut
avec l’aide de la collectivité nationale.
Notre objectif est de remettre la République
sur ses pieds par la mise en œuvre des mesures qui découlent de ces principes
à la base de l’histoire de France depuis plus de deux siècles. Plus que
jamais, dans les temps troublés que nous connaissons, ils représentent un môle
solide. Ils constituent des repères communs dans la tempête. Ils sont le phare
qui nous indique le chemin en évitant les écueils.
Oui, nous sommes entrés dans une période
d’incertitudes internationales. Et, la France se trouve désarmée. Un Président
de la République, qui se réclame du général de Gaulle, a désarmé la
France. Notre défense nationale reposait sur la force de dissuasion nucléaire.
Jacques Chirac l’a engagée dans une logique de dépendance, puis de
disparition. Pour complaire à quelques pacifistes australiens et à quelques
pasteurs presbytériens, il a non seulement arrêté les essais, essais
souterrains ne rejetant aucune radio-activité dans l’atmosphère, mais il a démantelé
le centre de Mururoa, rendant très difficile tout retour en arrière. A
l’entendre, d’ici quelques années, des ordinateurs très puissants
devraient remplacer les tirs en grandeur réelle.
D’une part, ces ordinateurs
n’existent toujours pas et leur mise au point est plus difficile que prévue.
De plus, leur technologie est entièrement américaine. D’autre part, en tout
état de cause, les essais restent de temps à autre nécessaires pour vérifier
la fiabilité du matériel ; d’ailleurs, les Etats-Unis n’ont pas
ratifié le traité interdisant les essais nucléaires souterrains.
Certains diront que la force de frappe
est inopérante pour dissuader le terrorisme : c’est vrai. Mais, dans ce
domaine encore, le Président de la République sortant a aussi désarmé la
France. Par démagogie « jeuniste », Jacques Chirac a de fait
supprimé la conscription. En contrepartie, il n’a pas prévu une forme de
garde nationale pour assurer en cas de besoin une surveillance quadrillant le
pays, notamment celle des nombreux points névralgiques. L’agitation actuelle
cache mal les dramatiques lacunes de la défense opérationnelle du territoire.
Je ne m’étendrai pas sur les autres inconvénients de la disparition du
service militaire. Un outil essentiel d’intégration dans la République a été
balayé. Il fallait le rénover et non le condamner. Jean-Pierre Chevènement a
fait des propositions réalistes pour que la France retrouve une armée conforme
à la diversité de ses besoins. Il ne recrée pas le service national ou
militaire. Il propose la constitution d’une garde nationale avec l’appel aux
jeunes sous les drapeaux pour 10 semaines, volontariat pour les filles. Service
sportif visant à recréer le lien décisif entre la Nation et l’armée et
assurant les moyens nécessaires en cas de crise, attentat, guerre chimique ou
bactériologique. Aujourd’hui l’armée française défile toute entière le
14 juillet sur les Champs-Elysées, ou assure une présence coûteuse et
dangereuse au Kosovo en Bosnie et ailleurs.
On ne peut que déplorer que le Premier
Ministre sortant ait encore amplifié ce désarmement unilatéral sous couvert
d’économies budgétaires. Lionel Jospin n’en a même pas profité pour développer
l’armement classique. Ainsi, un exemple parmi tant d’autres, le porte-avions
Foch a été bradé au Brésil alors même que le Charles-de-Gaulle n’est pas
encore opérationnel. Cela veut dire qu’aujourd’hui même la France est dépourvue
de force aéronavale. Quant à l’Europe de la défense, c’est une dangereuse
chimère. Depuis le 11 septembre, la Grande-Bretagne court au-devant des
Etats-Unis pour intervenir en Afghanistan sans consulter ses « alliés »
de l’Union européenne. L’Union européenne n’est pas une Nation, il n’y
a pas de peuple européen, il n’y a pas de citoyenneté européenne, il n’y
a pas d’Etat européen, il n’y aura pas d’armée européenne.
Aux incertitudes internationales,
s’ajoute l’insécurité intérieure. Les lois de la République sont trop fréquemment
bafouées sous les prétextes les plus divers, donnant à certains un sentiment
d’impunité. Depuis un demi-siècle, la société a profondément changé. Un
certain nombre de principes idéaux posés ans le sillage de la Libération ne
sont plus adaptés. On peut le regretter, et je suis même le premier à le
regretter. Mais, il faut voir le monde tel qu’il est, et non tel que nous
aimerions qu’il soit. Ainsi, l’ordonnance de 1945 sur la délinquance des
mineurs ne correspond plus aux réalités actuelles. Il faut la réviser en
profondeur. Trop de sauvageons troublent la vie des quartiers populaires et
parfois même des campagnes qui se croient encore paisibles. En fait, soyons
lucides, ces sauvageons s’attaquent d’abord aux plus faibles, aux plus défavorisés.
Comme vous vous en souvenez sûrement
quant il était ministre de l’Intérieur, Jean-Pierre Chevènement a cherché
tant à rénover la loi qu’à redonner force et vigueur à son application. Il
a été bien souvent contré par Elisabeth Guigou, alors ministre de la Justice,
soutenue par Lionel Jospin. Il n’a pas eu tous les moyens nécessaires pour
mettre en œuvre sa grande réforme sur la police de proximité. Il a été
combattu par tous les angélismes, ceux des beaux quartiers comme ceux des idéologies
périmées. Ces angélismes n’épargnent pas l’autorité judiciaire. La présomption
d’innocence doit être scrupuleusement respectée, mais avec intelligence et
discernement. Libérer un multirécidiviste sous prétexte qu’une instruction
un peu longue est une faute.
En réalité, si la justice marche sur la
tête, c’est parce que tout contrôle démocratique a été aboli avec l’indépendance
du Parquet. Cette décision de laisser l’autorité judiciaire sans véritable
directive donnée par un pouvoir élu par le peuple est une illustration supplémentaire
de la politique « du pareil au même », pratiqué par tous les
gouvernements de droite ou qui se disent de gauche. Ils se succèdent, mais ils
ne changent pas. Les hommes et les femmes partent ou reviennent dans les ministères.
Au bout du compte, ils font tous et toujours la même politique. Ainsi, le
principe de l’indépendance du Parquet a été décidé par Jacques Chirac. Sa
mise en œuvre est revenue à Lionel Jospin. Les deux se sont accordés pour
priver les citoyens de ce pays de tout regard démocratique sur la justice qui
les regarde, pourtant, au premier chef. C’est pour cela que lorsqu’éclate
un scandale les cris des uns et des autres relèvent de l’hypocrisie. C’est
pour cela que les Français hésitent de plus en plus à leur faire confiance.
Les partisans de ces réformes de la
justice diront que le problème réside dans le manque de moyens. Bien sûr, on
peut demander toujours plus de moyens pour la justice et pour la police. Et, il
leur faut des moyens supplémentaires. Mais, l’essentiel est ailleurs,
l’essentiel est dans la volonté politique, la volonté de combattre sans
faiblesse le crime et le délit, sans compter le terrorisme. Dans la République,
la volonté politique doit être légitimée par la sanction du suffrage
universel. La séparation des pouvoirs n’implique pas la guerre des pouvoirs,
mais, au contraire, leur coopération. L’autorité judiciaire doit se garder
de faire la loi, ou même de la détourner en croyant capter l’air du temps.
Elle doit l’appliquer aux dossiers concrets qui lui sont soumis. Et, ce métier
en lui-même est déjà bien difficile, si on veut l’accomplir tant avec
rigueur qu’avec intelligence et discernement. Les Français demandent avant
tout la sécurité, et donc aussi la sécurité judiciaire.
Enfin, une mondialisation sans frein, un
libéralisme déchaîné, une soumission aveugle au marché mettent en péril
notre protection sociale, quant ils ne portent pas atteinte à la santé
publique. Il y a quelques mois, l’OMS, l’Organisation Mondiale de la Santé,
a placé la France en tête de tous les pays du monde quant à la santé de ses
habitants. Cette position flatteuse s’explique avant tout par notre système
égalitaire et public de sécurité sociale. Aujourd’hui, il est menacé par
les privatisations et par les restrictions budgétaires, quelles que soient les
annonces cosmétiques à six mois des élections. Il fallait bien accorder
quelques concessions à Robert Hue à quelques jours de son congrès. Il est
symbolique que ce ballon d’oxygène lui soit accordé sur l’Hôpital.
Certes, il fait semblant de refuser en disant que c’est insuffisant. Mais,
cela fait parti du jeu de rôles entre le PCF et le PS depuis 1997. En même
temps, notre système de retraites par répartition est de plus en plus attaqué
au profit de la capitalisation, dont on connaît les dangers et l’injustice.
Un mot encore sur la maladie de la vache
folle, dont les principales victimes sont nos éleveurs qui n’en peuvent mais.
L’origine s’en trouve dans une recherche effrénée du profit conduisant à
un chauffage insuffisant. Les procédures techniques de sécurité pour les
consommateurs ont été affaiblies pour mieux enrichir les actionnaires. Il paraît
que cela se nomme la profitabilité. Il paraît que cela serait l’avenir.
Au lieu d’atténuer, voire d’empêcher,
les conséquences de cette mondialisation ultra-libérale, la construction européïste
les encourage et les accélère. Elle y ajoute tout le poids d’une
bureaucratie tatillonne et omniprésente. Elle veut tout contrôler et décider
de tout. La commission de Bruxelles avec ses compères de la Banque centrale
européenne ne cherche pas le plein emploi, trouvant même des vertus au chômage,
ni même la satisfaction des besoins matériels des gens. Non, leur objectif est
de combattre une inflation qui ne menace plus depuis longtemps ou encore
d’assurer une concurrence absolue. Ils en arrivent à dresser des barrages
devant tout projet industriel. Ils cherchent à démanteler tous les services
publics, comme en témoignent les projets de privatisation de la Poste et
d’EDF. Ils se comportent plus en empêcheurs de faire et d’entreprendre
qu’en force d’impulsion et d’entraînement. Il paraît que c’est l’intérêt
des consommateurs. Mais, avant de consommer, il faut produire. Mais, il ne faut
pas produire n’importe comment. Notre agriculture et notre industrie doivent
s’inscrire dans une perspective de développement durable qui ne se limite pas
seulement aux critères économiques. Les retombées sociales et la protection
de l’environnement doivent aussi être des facteurs décisifs.
Alors, dans ce contexte, que
proposons-nous aux Français ? Nous leur proposons la France, le retour de
la République, de la puissance publique, de l’intérêt général. Or, les
Français demandent à être protégés par un Etat républicain, qui sache en même
temps les motiver et les mobiliser. Voilà le grand dessein autour duquel se
retrouvent les citoyens qui soutiennent Jean-Pierre Chevènement. Voilà
pourquoi il perce désormais dans l’opinion. Voilà pourquoi il est bien
l’homme de la Nation.
Mais, quelle que soit la crédibilité
qu’il commence à acquérir, il a encore un long chemin à parcourir avant que
ne s'ouvrent devant lui les portes de l'Elysée. Et, ce chemin, il ne peut le
parcourir seul. Il a besoin de nous. Il a besoin de vous. Dans chaque département,
dans chaque canton, dans chaque ville, nous devons constituer de larges comités
de soutien à sa candidature. Il ne s’agit pas d’en faire des compagnies de
majorettes à l’américaine ou des claques lançant des confettis. Notre
souhait est d’avoir des comités qui correspondent dans leur composition au pôle
républicain. Ils doivent devenir des lieux de discussion et de proposition. Ils
doivent devenir les transformateurs locaux de la vie politique nationale. Ils
doivent impulser la dynamique du renouvellement et du changement.
Nous sommes ici, ce soir, pour en parler.
Si vous le voulez bien, nous pouvons sortir de cette réunion avec des décisions
concrètes pour la Creuse et pour
Guéret, pour la France et pour la République.